La Sapco et ses partenaires ont organisé du 23 au 29 mai dernier, la semaine du tourisme local à Saly-Portudal dénommée Sen’Saly, pour promouvoir le tourisme local et mettre fin à la saisonnalité de l’activité touristique au Sénégal. Au menu, il y avait, au-delà de la cérémonie officielle, un concert animé par Youssou Ndour, une journée de l’environnement, des initiations au golf, des tournois de poker, de pétanque, des soirées reggae, des défilés de mode, des veillées culturelles, entre autres activités. Cette innovation était pour les initiateurs, «une façon de rompre avec la vieille habitude de beaucoup de Sénégalais qui préfèrent aller en vacances à l’étranger, alors que le pays regorge de beaucoup de réceptifs hôteliers avec une offre touristique diversifiée». Mais, si le degré de réussite d’une manifestation se mesure par la mobilisation, par les retombées en termes économiques, de visibilité, tout porte à croire que cette initiative, qui était censée «conscientiser les Sénégalaises et les Sénégalais sur les opportunités touristiques qu’offre la station balnéaire de Saly», n’a pas séduit. Même si les organisateurs crient sur tous les toits qu’ils ont réussi. Le constat des acteurs et des populations est triste : «Cet évènement a été un échec et ne restera certainement pas dans les annales du tourisme de la station balnéaire. Pendant les sept jours de Sen’ Saly, l’ambiance de Saly n’a pas varié.» Les activités de loisirs programmées n’ont pas fait foule, le public n’a pas été au rendez-vous et les courbes de fréquentation n’ont pas bondi. En attestent ces propos tenus par un acteur du tourisme à Saly qui n’a pas manqué de fustiger le contenu du programme : «Qu’est-ce que les Sénégalais qui viennent à Saly attendent d’une initiation au golf. On nous parle de tournoi de Poker, de dégustation de vin et de je ne sais quoi. Les organisateurs devaient savoir que pour faire venir les Sénégalais, il y a une palette d’offres en passant par la culture et tant d’autres choses», a décrié notre interlocuteur.
Non-implication des acteurs
Censé être une locomotive pour la relance du tourisme local, l’ambitieux projet de la Sapco a finalement échoué sur toute la ligne, pour des raisons qui demeurent obscures, mais non innocentes. Ce fiasco était prévisible du fait d’un manque d’articulation avec la majorité des acteurs qui ont été royalement ignorés. D’autres ont préféré tout simplement bouder cette initiative «impopulaire». A l’arrivée, c’est un véritable volet de bois vert que les organisateurs de Sen’Saly ont essuyé. Pour beaucoup d’acteurs, l’absence massive des professionnels du secteur lors de la cérémonie officielle en dit long sur l’amertume qui anime ces derniers, préférant laisser le parking de l’hôtel Les Bougainvilliers aux groupes de danse et quelques invités venus assister à cet évènement annoncé en grande pompe. Ces acteurs ne sont pas les seuls, car la mairie de Saly aussi a également brillé de par son absence ; un «boycott» confirmé par le président de la commission du tourisme de la municipalité. Bocar Diallo n’y est pas allé avec le dos de la cuillère pour dénoncer l’attitude des organisateurs. Face à la presse, le conseiller a soldé ses comptes avec la Sapco. «Le tourisme est un département géré par l’Etat. En dehors de la Direction de la Sapco, tout le reste est géré par des privés. Des hôteliers aux guides, en passant par les fournisseurs, toutes ces corporations relèvent du privé. Le Sen’Saly devait être une réussite pour l’intérêt de la population. Malheureusement, la Sapco dont la mission principale est d’aménager les côtes s’est trop rabaissée en gérant une activité qui devait être programmée par le comité de station. Personne n’a été informé. Finalement, nous les avons laissé faire le programme et voilà le résultat. C’est le fait d’avoir écarté les professionnels qui explique ce cuisant échec. Maintenant, nous attendons le bilan», a souligné Bocar Diallo.
Les plaintes et complaintes de ces acteurs ont été portées également, par le secrétaire général chargé de la communication du syndicat national des travailleurs de l’hôtellerie et de la restauration, Doudou Ndiaye Kopa, qui a affirmé, sans ambages, que Sen’Saly a été «un pire échec». A son avis, «l’idée est pertinente, mais elle n’est pas nouvelle. Depuis une dizaine d’années, cette notion du tourisme local était une occasion d’offrir un Vsd aux députés et aux directeurs de société, sinon à une certaine classe sociale qui a l’occasion de venir passer des moments utiles et agréables…». Selon Doudou Ndiaye dit Kopa, «l’échec est patent et cela était prévisible depuis le départ». «Quand on fait du tourisme local, il faut impliquer tout le monde : guides, chauffeurs, hôteliers, population, communes, écoles de formation en hôtellerie, entre autres. Mais ce qu’on a constaté c’est qu’il y a un groupe restreint de personnes qui se sont enfermées dans leur bureau climatisé pour venir nous présenter un plan qui ne correspond pas du tout aux réalités du tourisme local», a-t-il expliqué. Par conséquent, indique-t-il, «beaucoup d’activités ont connu un échec patent. Tout le monde sait que le golf et le tennis symbolisent une certaine classe bien aisée. C’est pour cette raison que ces activités ont connu un échec. Car, on ne peut pas faire du tourisme local avec des produits haut de gamme qui ne sont pas à la portée des Sénégalais».
Source: Le quotidien
Un bilan fortement attendu
Sur le bilan tant attendu, les acteurs sont formels : «les organisateurs doivent nous présenter publiquement un bilan final pour que les citoyens sachent comment leur argent est géré par nos dirigeants», réclament-ils.
Mais avant même que ce bilan ne soit établi, Babacar Mbengue, directeur d’exploitation de la Sapco Saly, s’est empressé de se ruer vers certains médias pour dire que cette première édition a été une vraie réussite. «Cette initiative d’attraction et de fidélisation touristiques a été très appréciée surtout par la plupart des hôteliers de la station qui ont enregistré un taux de remplissage de 90 % pendant le week-end de cette semaine touristique», a-t-il dit.
Des chiffres battus en brèche par certains acteurs qui déplorent «cette mauvaise foi de la Sapco».